​​​​​Comment naît un musée ?L'exemple du musée de Cluny

Albert Lenoir, [Projet d'aménagement de la chambre des abbés de Cluny], [1843-1879], aquarelle et crayon, bibliothèque de l'INHA, OA 716 (2, 75). Cliché INHA

À l'occasion de la mise en ligne de 4 dessins d'Albert Lenoir concernant le musée de Cluny dont il fut l’architecte, penchons nous sur la genèse de ce musée qui ouvrit ses portes en mars 1844.  

Dès 1833, Albert Lenoir (1801-1891) expose au Salon son « Projet d'un musée historique formé par la réunion du Palais des Thermes et de l'Hôtel de Cluny ». Marchant sur les traces de son père Alexandre Lenoir (1761-1839), fondateur du Musée des Monuments français, il se dit désireux de voir renaître la pensée qui avait présidé à la création du Musée historique des Monuments français et de combler le vide laissé, en 1816, par la fermeture de ce dernier et la dispersion de tous les objets d'art qui y étaient conservés. La nécessité d'une telle entreprise ne paraît alors pas faire de doute. Artistes, historiens et grand public adhèrent à son projet, qualifié d'« idée heureuse » dans le Journal des débats politiques et littéraires du 13 mai 1833  par l'inspecteur général des Monuments historiques Ludovic Vitet (1802-1873).


Albert Lenoir, Vue générale des ruines, [1830-1867], encre et crayon, bibliothèque de l'INHA, OA 716 (1, 28). Cliché INHA

Lenoir propose de placer ce nouveau musée d'antiquités nationales dans 2 édifices : une maison historique, l'hôtel de Cluny, rue des Mathurins Saint-Jacques, et un monument gallo-romain, le palais des Thermes situé rue de la Harpe. Par la nature et l'aspect de leurs constructions, ces deux monuments représentent deux grandes périodes de l'histoire de l'architecture en France, celle de l'époque romaine et celle de l'art du Moyen Âge. Chaque édifice serait amené à accueillir naturellement les objets contemporains de sa construction. Par ce choix d'une répartition chronologique des collections, Lenoir souhaite illustrer la continuité de l'évolution de l'art à travers les siècles, thèse à laquelle l'ont conduit ses recherches sur l'émergence des styles.

Albert Lenoir, Hôtel de Cluny, façade principale, [1830-1879], encre et crayon, bibliothèque de l'INHA, OA 716 (21, 15). Cliché INHA
Albert Lenoir, Hôtel de Cluny, façade principale, [1830-1879], encre et crayon, bibliothèque de l'INHA, OA 716 (21, 15). Cliché INHA

En 1838, le préfet Rambuteau confie à Albert Lenoir les travaux de conservation des thermes acquis par la Ville de Paris. Quelques années plus tard, en 1843, l’État acquiert l’hôtel de Cluny et la vaste collection d’œuvres d'art qu'Alexandre Du Sommerard (1779-1842) y avait installée. Cette collection compte alors près de 1 500 pièces parmi lesquelles meubles, statues, objets, bijoux, armes, émaux, vitraux, faïences, étoffes et tentures, manuscrits... Cette collection très éclectique constituée d’objets du XVe au XVIIe siècle contraste avec l’image trop souvent véhiculée d’un Alexandre Du Sommerard grand collectionneur d’objets médiévaux uniquement.
La même année, la Ville de Paris cède à l’État les thermes gallo-romains et le dépôt lapidaire qu'ils contenaient, composé de pièces du XIe au XIIIe siècle. Le 29 août 1843, Albert Lenoir est nommé architecte de ce vaste ensemble réunissant les 2 édifices et les 2 collections en un seul musée. Après quelques mois de travaux, le musée ouvre ses portes et 12 000 visiteurs se pressent à l'inauguration.

Albert Lenoir poursuit son action d’étude, de restauration et de mise en valeur de ce patrimoine unique pendant encore de nombreuses années. Il travaille à l'aménagement et la conservation du lieu en étroite collaboration avec Edmond Du Sommerard (1817-1885), fils du collectionneur, nommé conservateur à vie du musée.

Comme l'affirme aujourd'hui encore Michel Huynh, Conservateur en chef au musée de Cluny, Musée national du Moyen Âge (2014) : « Cette association entre un architecte et un conservateur, chacun fils d’une figure patrimoniale éminente, a façonné en profondeur le musée de Cluny, qui conserve encore une part significative des dispositions issues de leur action ».


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Élodie Desserle

Service de l'informatique documentaire

Publié par Elodie DESSERLE le 10 mars 2016 à 09:03

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