Takesada Matsutani, Estampes, 1967-1977Une exposition aux Abattoirs de Toulouse

 Takesada Matsutani, La Propagation –N Noire, eau-forte et aquatinte, 1967. Bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art, EM MATSUTANI 5. Cliché INHA

La bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art a reçu une importante donation de la part de Takesada Matsutani. Cette donation est au cœur de l’exposition présentée aux Abattoirs à Toulouse du 28 février au 31 mai 2020 : Takesada Matsutani. Estampes, 1967-1977.

Le 7 janvier 2020, l’artiste japonais installé en France, Takesada Matsutani, a enrichi les collections de la bibliothèque de l’INHA. La donation comprend une centaine de pièces (88 estampes, un portfolio de 9 photogravures et 3 livres d’artiste). Elle reflète toute la diversité et l’étendue de la pratique de l’artiste dans le domaine de l’estampe, depuis ses débuts en 1967 jusqu’à ses créations récentes de 2016.

 

Takesada Matsutani, Cercle 16-3, eau-forte, 2016. Bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art, EM MATSUTANI 85. Image courtesy the artist and Hauser & Wirth
Takesada Matsutani, Cercle 16-3, eau-forte, 2016. Bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art, EM MATSUTANI 85. Image courtesy the artist and Hauser & Wirth

Ces estampes rejoignent une collection commencée au début du XXe siècle par le grand couturier et mécène Jacques Doucet, qui a cherché à rassembler les estampes des artistes les plus importants des années 1780 aux années 1910 (Goya, Degas, Toulouse-Lautrec, Gauguin, Matisse, etc. – une grande partie de ces œuvres est consultable dans la Bibliothèque numérique). Cette collection de presque 14 500 pièces continue de s’enrichir, principalement grâce au don d’œuvres d’artistes étrangers ayant travaillé en France et ayant participé au renouveau de l’estampe au XXe siècle : Kiyoshi Hasegawa, Johnny Friedlaender, Terry Haass, et tout récemment Ellsworth Kelly.

Une part très significative de la donation de Takesada Matsutani à l’INHA est présentée pour la première fois au public dans le cadre des Abattoirs, Musée - Frac Occitanie Toulouse. Du 28 février au 31 mai 2020, l’exposition Takesada Matsutani. Estampes, 1967-1977. Collections de l’Institut national d’histoire de l’art montre 38 des 88 estampes données. En écho aux autres ensembles exposés dans ce musée au même moment, l’exposition met l’accent sur les premières années parisiennes de l’artiste et met en valeur une période (1967-1977) pendant laquelle l’estampe revêt une importance particulière dans son œuvre.

Takesada Matsutani dans son atelier parisien, montrant les deux plaques de cuivre gravées, matrice de l’Angle vert, 1968 (EM MATSUTANI 16). Cliché Nathalie Muller
Takesada Matsutani dans son atelier parisien, montrant les deux plaques de cuivre gravées, matrice de l’Angle vert, 1968 (EM MATSUTANI 16). Cliché Nathalie Muller

Né à Osaka au Japon en 1937, Matsutani se forme au dessin et à la peinture. En 1959, à l’atelier de dessin de l’École d’art des Citoyens de Nishinomiya, il rencontre Sadamasa Motonaga, l’un des membres du groupe Gutai, fondé par Jiro Yoshihara en 1954. Au début des années 1960, il commence à travailler avec un matériau nouveau, la colle vinylique, dont il explore les propriétés plastiques, et crée des œuvres dans lesquelles les formes organiques sont prépondérantes. Le caractère novateur de son œuvre est rapidement reconnu. Il devient membre permanent de Gutai à partir de 1963 et expose avec ce groupe jusqu’à sa dissolution en 1972. Après avoir remporté en 1966 un prix de l’Institut français du Japon, Matsutani vient à Paris et intègre très vite l’Atelier 17, animé par Stanley William Hayter, dont il devient l’assistant. Il y apprend les techniques du burin, de l’eau-forte et de l’aquatinte. En 1968, il rejoint parallèlement l’atelier de sérigraphie créé par Kate Van Houten et Lorna Taylor. Après presque une décennie consacrée principalement à l’estampe, Matsutani reprend dans les années 1970 la création d’œuvres sur toile avec de la colle vinylique et entame un travail, qu’il poursuit encore, reposant sur les rapports entre le noir de l’encre, les reflets des traits de graphite et le blanc du papier ou de la toile.

Le parcours de l’exposition présente quatre ensembles témoignant de la richesse et de la diversité des directions explorées par l’artiste entre 1967 et 1977. Réalisés à l’Atelier 17, les eaux-fortes, aquatintes et burins des années 1967-1968 traduisent les recherches personnelles de Matsutani, associant formes organiques (1967-1968) et transposition d’espaces en trois dimensions (1968-1969). À partir de 1968, la technique de la sérigraphie lui permet d’explorer deux directions différentes : les formes géométriques en aplats de couleurs, pouvant évoquer le Hard Edge (1969-1971), et la photo-sérigraphie transposant en surfaces tramées les œuvres réalisées antérieurement grâce à la colle vinylique (1973-1977).

Takesada Matsutani, Propagation –S-4-A, sérigraphie, 1969. Bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art, EM MATSUTANI 28. Image courtesy the artist and Hauser & Wirth
Takesada Matsutani, Propagation –S-4-A, sérigraphie, 1969. Bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art, EM MATSUTANI 28. Image courtesy the artist and Hauser & Wirth

Dans l’exposition, les estampes sont accompagnées de pièces prêtées par l’artiste : deux plaques gravées, qui sont les matrices de deux des estampes exposées, des outils de graveur, des photographies de l’artiste au travail, les catalogues des expositions internationales et biennales dans lesquelles ses œuvres ont été exposées et primées. Le rôle des expositions internationales d’estampes est, en effet, très important dans le développement de la pratique de l’estampe par les artistes de la deuxième moitié du XXe siècle. C’est ainsi grâce à la biennale de gravure de Tokyo de 1960 que Matsutani découvre l’œuvre de Stanley William Hayter, qu’il rencontre ensuite à Paris. C’est aussi dans le cadre de ces biennales que l’œuvre gravé de Matsutani est reconnu : il participe ainsi entre autres à la première biennale internationale de l’estampe à Paris en 1968, et expose la même année à celles de Barcelone, Vienne et Bradford. Ses œuvres sont montrées lors de nombreuses éditions de l’exposition internationale d’arts graphiques de Ljubljana, de la biennale internationale d’arts graphiques de Cracovie, de la biennale internationale de gravures de Tokyo, de la biennale internationale de gravure de Grande-Bretagne, de la biennale internationale d’arts graphiques de Norvège, etc.

Deux vidéos (une interview faite à Paris et une performance réalisée à Los Angeles en 2017) complètent le parcours et donnent un aperçu de l’approche de Matsutani et de l’évolution de son œuvre jusqu’à ses réalisations les plus récentes.

 

Après la rétrospective organisée au Centre Pompidou l’an dernier, l’exposition aux Abattoirs des 38 estampes et des pièces qui les accompagnent permet de faire redécouvrir en France tout un pan de l’œuvre de Matsutani et de rendre sensible le rapport privilégié que l’artiste a entretenu pendant une décennie avec les différents modes d’expression permis par les diverses techniques de l’estampe. Elle donne aussi à voir plus largement la part de l’estampe dans la création artistique internationale des années 1960-1970.

 

Références bibliographiques

Caroline Fieschi et Nathalie Muller
service du Patrimoine

Publié par Jérôme DELATOUR le 19 février 2020 à 08:00

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